…enfin, je crois. J’ai fait de bonnes grosses siestes dernièrement si bien que je ne sais plus trop lesquelles avaient lieu la nuit. J’ai un peu perdu le compte, c’est qu’on dort si bien dans la petite cabane que l’humaine m’a offerte ! Je peux y rêver de prairies de fromage à loisir, en toute sécurité.
Grosse déception aujourd’hui, j’ai compris que je n’ai pas de pouce opposable. J’ai tenté d’écarter mes phalanges tant bien que mal, il n’y a rien eu à faire. Je ne pourrai donc pas déverrouiller le loquet de l’ouverture placée en haut de la cage au-dessus de ma tête. Ça a été une bien triste constatation mais il m’a bien fallu me rendre à l’évidence, ça dépasse mes compétences de cochonne d’Inde pourtant déterminée. Malgré un entraînement quotidien acharné depuis deux jours, je n’ai pas réussi à attraper de graine de tournesol avec une patte… avec deux pattes non plus d’ailleurs (ces maudits hamsters nous supplantent dans ce domaine, affreux mini-rongeurs !).
Le désespoir m’a saisie, j’étais si près du but ! Il ne me restait plus que l’élongation des membres supérieurs et l’extraction par le haut pour arriver à ouvrir cette satanée porte de toit ! Ça s’est joué à presque rien.
Et comme si cette journée n’était pas suffisamment gâchée par cet amer constat, les humains ont décidé de remettre ça avec leur stupide idée de repas « raclette ». Je n’ai pas compris de quoi il s’agissait mais tout ce que je peux décrire c’est l’odeur ignoble qui se dégage dès que le procédé est enclenché. Un véritable calvaire pour une cochonné d’Inde aussi raffinée que moi, surtout quand celle-ci ne peut pas se boucher le nez faute de pouce opposable.
J’ai dû remplir toute ma cabane de foin et m’enfoncer le museau dedans. Et là, réconfortée par cette douce odeur de prairie, je me suis mise à rêver aux paysages féeriques décrits par grand-mère Fada, m’imaginant courir dans le gouda, le brie et la mimolette.
Saletés d’humains, ils ne m’auront pas !